Rapport de l'ASN 2023

L’ASN constate que, si les fournisseurs de rang 1 sont bien associés aux démarches engagées, un travail important reste à mener sur leurs sous-traitants. L’ASN constate régulièrement des situations lors desquelles ces derniers méconnaissent les exigences applicables, voire ignorent que leur produit est destiné à un usage nucléaire. L’ASN va prochainement diffuser une brochure pédagogique à destination de ces acteurs, afin qu’ils appréhendent mieux les exigences réglementaires applicables à leurs activités. Par ailleurs, elle a partagé les constats de ses inspections avec les principaux donneurs d’ordre, auxquels elle a demandé d’amé- liorer leur maîtrise des chaînes d’appro- visionnement. Le contrôle de l’ASN est entré dans une nouvelle phase avec le dépôt à l’été 2023 par EDF de sa demande d’autorisation de création de deux réacteurs à Penly. L’ASN assure l’instruction technique de ce dossier pour le compte du Gouvernement, en vue d’une autorisation de création vers la fin de l’année 2026. LES PETITS RÉACTEURS MODULAIRES À la suite de l’appel à projets lancé par le Gouvernement sur des réacteurs innovants, de nouveaux concepteurs de PRM d’une dizaine à quelques centaines de mégawatts ont émergé, en faisant le pari qu’une réduction importante de la puissance permettra de drastiquement réduire leur complexité et de renforcer l’effet de série grâce à une fabrication en usine. Le terme «PRM» recouvre des technologies et des usages variés. Plusieurs projets pour fournir de l’énergie directement sous forme de chaleur à des températures de plusieurs centaines de degrés constituent ainsi, pour de nombreux procédés industriels, une alternative aux combustibles fossiles. En matière de technologie, si on retrouve quelques projets de réacteurs à eau légère de la même filière que ceux actuellement en exploitation en France, la grande majorité des nouveaux acteurs fait le choix de développer des réacteurs utilisant des filières différentes. L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) avait examiné en 2015 le niveau de maturité des différentes filières de réacteurs et avait conclu que seuls les réacteurs à neutrons rapides refroidis au sodium (Sodium Fast Reactor – SFR) et les réacteurs à haute température refroidis au gaz utilisant du graphite comme modérateur (filière HTGR pour High Temperature Gaz cooled Reactor) disposaient d’un REX exploitable. L’IRSN avait également recensé pour chaque filière les compléments de connaissances scientifiques et techniques à acquérir avant d’envisager des démonstrateurs industriels. La plupart des filières nécessitent encore des développements importants. Les premiers échanges avec un porteur de projet permettent de faire le point sur ses choix technologiques, ainsi que sur son programme de recherches et d’essais engagé pour être en capacité d’établir et de justifier la démonstration de sûreté d’un réacteur industriel ou d’un premier prototype expérimental. Au-delà des aspects techniques spécifiques au développement de chaque projet, les PRM posent des questions nouvelles ou réinterrogent certaines pratiques. À ce titre, l’ASN participe à plusieurs groupes de travail internationaux pour échanger avec ses homologues étrangères dans l’objectif de promouvoir l’établissement de référentiels internationaux ambitieux. Le premier sujet concerne la définition des objectifs de sûreté de ces PRM. En effet, les porteurs de projet de ces nouveaux réacteurs ambitionnent d’en déployer sur de nombreux sites industriels qui peuvent se situer à proximité de zones urbaines. L’ASN a donc mis en place un groupe de travail pluraliste pour mener une réflexion sur les objectifs de sûreté qui seraient à fixer pour envisager de telles implantations. Au regard du nombre important de projets émergents, l’ASN a défini des modalités adaptées d’échange et de travail avec ces nouveaux acteurs afin d’une part de proportionner la mobilisation de ses ressources et de celles de l’IRSN en fonction du niveau de maturité des projets, et d’autre part de s’adapter à la réactivité des porteurs de projet. En particulier, les échanges dans les premières phases sont plus informatifs et itératifs, afin de faire un retour rapide sur les questions ou difficultés que posent les choix de conception envisagés. Quelques projets devraient entrer dans une nouvelle phase en 2024, avec l’instruction des premiers dossiers prévus par la réglementation (avis de l’ASN sur les options de sûreté ou demande d’autorisation de création). LES INSTALLATIONS DU « CYCLE DU COMBUSTIBLE » Le développement d’un réacteur d’une nouvelle filière technologique n’est pas un projet autonome. Il s’inscrit nécessairement dans un ensemble de projets interdépendants de nouvelles installations nucléaires capables, en amont de produire son combustible nucléaire spécifique, et en aval de gérer son combustible usé ainsi que les déchets issus de son exploitation et, à terme, de son démantèlement. Or les installations existantes du «cycle du combustible» ont été conçues pour servir les besoins d’un parc nucléaire composé de réacteurs d’une seule filière, utilisant des combustibles relativement similaires. Ces installations ont par ailleurs été mises en service il y a plusieurs décennies et la poursuite de leur exploitation à moyen voire long terme, au-delà de 2040 qui était l’horizon précédemment envisagé, présente des enjeux de sûreté forts qui doivent être examinés au regard des standards les plus récents et la décision de construire de nouvelles installations doit intervenir dans les plus brefs délais, afin que celles-ci puissent être conçues et réalisées dans des conditions de sûreté et de radioprotection maîtrisées. Compte tenu des besoins de fabrication, et possiblement de retraitement, des combustibles nécessaires aux réacteurs d’un nouveau programme nucléaire ou aux PRM, l’ASN souligne l’importance que ces futures installations disposent des marges capacitaires nécessaires et mettent en œuvre des technologies suffisamment ambitieuses pour y répondre dans les meilleures conditions de sûreté et de maîtrise des inventaires de matières et déchets radioactifs. Les entreposages et moyens de transport nécessaires devront également être anticipés dans ce même objectif. n FAITS MARQUANTS 2023 Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2023 13

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