Rapport de l'ASN 2023

Par ailleurs, l’analyse du respect des exigences réglementaires portant sur la gestion des événements sur la période 2019-2023 montre une proportion constante de services respectant la réglementation, sur les trois dernières années, avec des disparités importantes selon les exigences concernées (voir graphique 2 page précédente) : ∙ la détection des événements indésirables, leur déclaration (en interne ou à l’ASN) et leur recueil sont jugés globalement satisfaisants avec des taux variant entre 74 % et 85 % sur la période considérée mais en baisse de 2021 à 2023 ; ∙ l’analyse de ces événements indésirables, la définition d’actions correctives et leur capitalisation, après une première phase de progression, et ensuite une stabilisation en 2021 et 2022 autour de 75 %, est en baisse avec 60 % des centres inspectés qui réalisent ces étapes de façon satisfaisante en 2023 ; ∙ l’amélioration des pratiques par le REX et l’évaluation de l’efficacité des actions correctives constituent toujours le point faible de ces démarches de REX avec seulement entre 29 % et 36 % des centres inspectés pour lesquels la situation est jugée satisfaisante. Le résultat est stable sur la période 2019-2023, mais avec une certaine dynamique de progrès pour ce point en 2023 avec 49 % de satisfaction (voir graphique 2 page précédente). Ces démarches doivent en particulier associer des représentants de l’ensemble des professionnels contribuant à la réalisation des soins. L’ASN constate une participation plus importante des radiothérapeutes dans ces démarches dans les centres inspectés en 2023. En outre, l’évaluation régulière des actions correctives mises en place et la mise à jour de l’analyse des risques a priori – obligatoire en application de la décision n° 2021-DC-0708 de l’ASN du 6 avril 2021 précitée – à partir des enseignements issus des événements déclarés en interne sont incontournables pour faire progresser la qualité et la sécurité des soins. En effet, seule l’évaluation des actions correctives permet de tester dans la durée la robustesse des mesures prises. L’ajout de points de contrôle peut par exemple constituer une « fausse sécurité » si ceux‑ci ne peuvent pas être mis en œuvre par les professionnels pour diverses raisons. En outre, l’analyse des événements peut révéler que les barrières de sécurité mises en place n’ont pas été efficaces comme celles permettant de s’assurer de la délivrance du traitement du bon côté (voir encadré page 219), ce qui doit conduire à réviser l’analyse des risques a priori et à réfléchir en équipe à des parades plus robustes. La capacité d’un centre à déployer une démarche de gestion des risques a de nouveau fait l’objet d’investigations particulières en 2023. Il en ressort que : ∙ les exigences de management de la qualité et de la sécurité dans les services de radiothérapie sont respectées dans la plupart des cas. Des hétérogénéités persistent toujours d’un centre à un autre. Ainsi, l’analyse des risques a priori n’est complète ou actualisée que dans moins de la moitié des centres inspectés (44 %), principalement par manque de formation, de moyens, ou du fait d’un changement de responsable opérationnel de la qualité. Cette incomplétude porte, par exemple, sur l’absence de prise en compte du REX (par exemple celui d’autres centres, diffusé par des publications de l’ASN – bulletins « La sécurité du patient » et fiches « Retour d’expérience ») ou des nouvelles pratiques ou l’organisation du centre en cas d’évolution du plateau technique ; ∙ le pilotage de la démarche de gestion des risques est mis en œuvre de façon satisfaisante dans 66 % des centres inspectés. Ce sont les centres pour lesquels la direction est impliquée dans la démarche et a défini une politique avec des objectifs opérationnels, partagés, évaluables et évalués, a alloué les ressources Les dispositions réglementaires fixant des obligations d’assurance de la qualité pour les centres de radiothérapie ont été publiées en 2008. Elles font partie d’un ensemble de mesures prises par les autorités en France à la suite des accidents de radiothérapie d’Épinal et de Toulouse survenus à la fin des années 2000. Le 15 mars 2023, l’ASN a rassemblé les acteurs de la radiothérapie pour dresser un REX des 15 ans de la démarche qualité en radiothérapie. Environ 250 participants – professionnels de la radiothérapie, représentants des institutions du domaine sanitaire et inspecteurs de la radioprotection de l’ASN – ont interrogé la manière dont les démarches qualité contribuent à la performance du système de soins, dans un contexte de plus grande complexité, de moindres ressources et de fortes innovations. Invité en qualité de grand témoin, René Amalberti, directeur de la Fondation pour une culture de sécurité industrielle, a évoqué en ouverture la crise actuelle du système de santé et questionné le risque de «sur-qualité». La parole a ensuite été donnée aux représentants des centres de radiothérapie pour un partage sur la mise en œuvre des systèmes d’assurance de la qualité, l’analyse de risque a priori, les démarches de REX des événements indésirables et de conduite du changement. Le séminaire a également permis, en présence du ministère chargé de la santé et de la HAS, de discuter de l’apport des audits cliniques par les pairs, dont l’expérimentation a débuté en 2023, ainsi que des modalités d’évaluation des techniques et pratiques innovantes, notamment au travers du forfait innovation. Le séminaire a été l’occasion de faire le constat que les principaux fondamentaux de la sécurité sont en place dans les services de radiothérapie et de souligner une amélioration très notable de la culture qualité-sécurité depuis 2008. Il a mis en lumière la nécessité pour les services de radiothérapie de s’approprier ces démarches et de trouver leurs propres modalités de mise en œuvre en les adaptant afin de les pérenniser. Ce séminaire a également montré le risque de routinisation et d’essoufflement des démarches d’amélioration continue. Plusieurs centres ont pris des initiatives pour redonner du sens et maintenir l’intérêt des professionnels pour les démarches qualité-sécurité. Leur témoignage a montré l’importance du leadership, du travail en équipe, de la communication, de l’appui de qualiticiens et de la prise en compte des situations réelles de travail. L’apport du contrôle de l’ASN a également été souligné. Il permet aux centres de re-questionner leurs démarches qualité-sécurité et de trouver de nouvelles pistes de travail permettant de garder la dynamique collective. Enfin, les discussions ont mis en lumière les limites des démarches qualité, notamment la tendance à l’inflation documentaire et une orientation trop forte des indicateurs vers les processus et non vers les résultats. Ces constats, qui ne sont pas spécifiques à la France, nécessitent de s’interroger collectivement sur la simplification de ces démarches et sur le choix des indicateurs. L’ASN poursuivra ses réflexions sur les démarches d’assurance de la qualité et de gestion de risque, en lien avec l’ensemble des acteurs de la radiothérapie, afin de construire son contrôle de demain. SÉMINAIRE DES ACTEURS DE LA RADIOTHÉRAPIE : L’ASN DRESSE LE BILAN DE LA DÉMARCHE QUALITÉ-SÉCURITÉ EN RADIOTHÉRAPIE POUR ADAPTER SON CONTRÔLE DE DEMAIN Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2023 217 • 07 • Les utilisations médicales des rayonnements ionisants 07 05 15 08 11 04 14 06 13 AN 03 10 02 09 12 01

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