Rapport de l'ASN 2023

La SFRO a constitué un groupe de travail en 2023, auquel l’ASN a participé, et publié en décembre 2023 des recommandations permettant d’anticiper et de limiter les risques liés à des cyberattaques dans un contexte où la numérisation des données est croissante. Cet article souligne l’importance de conserver des données «papier» minimales pour permettre la poursuite du traitement en l’absence de disponibilité des données informatiques: coordonnées patients, résumé du dossier, histogrammes dose–volume, nombre de séances réalisées, description du plan de traitement, etc. 2.2 LA CURIETHÉRAPIE La curiethérapie permet de traiter, de façon spécifique ou en complément d’une autre technique de traitement, certaines pathologies, en particulier des tumeurs cancéreuses. Cette technique consiste à placer des sources de radionucléides, sous forme de sources scellées, au contact ou à l’intérieur des tumeurs solides à traiter. Les principaux radionucléides employés en curiethérapie sont l’iridium-192 et l’iode-125. La curiethérapie met en œuvre trois types de techniques (détaillées ci‑après) qui diffèrent en particulier par le débit de dose mis en œuvre en fonction des indications. À l’instar de la radiothérapie, les enjeux de radioprotection sont liés à l’importance de la dose délivrée au patient et, le cas échéant, aux débits de dose élevés et à la maîtrise des équipements. En outre, s’agissant de source de haute activité, la gestion des situations d’urgence en cas de blocage de source, comme illustré par le REX des événements déclarés à l’ASN, ainsi que la sécurité des sources constituent des enjeux spécifiques de la curiethérapie. C’est pourquoi les contrôles de l’ASN portent, en plus de ceux relatifs à la radiothérapie externe, sur la gestion et la sécurité des sources. 2.2.1 La présentation des techniques Les enjeux de radioprotection en curiethérapie, outre la problématique de la gestion d’une source scellée, sont fonction du débit de dose associé à la technique, du mode de délivrance de l’irradiation à la tumeur (implantation permanente ou temporaire, ou application temporaire). L’utilisation le cas échéant de projecteurs de source évite la manipulation de ces sources par les professionnels et permet la réalisation des soins au patient sans irradiation du personnel. En revanche, il est nécessaire d’anticiper de possibles situations accidentelles liées au dysfonctionnement du projecteur de source et au débit de dose élevé délivré par les sources utilisées. La curiethérapie à bas débit de dose (Low Dose‑Rate – LDR) est aujourd’hui réalisée au moyen de sources scellées d’iode-125, sous forme de grains implantés de façon permanente, ou de césium-137 appliqués de manière temporaire. Les débits de dose sont compris entre 0,4 et 2 grays par heure (Gy/h). Un nouveau DM dit «DART» (Diffusing Alpha Emitters Radio Therapy) est actuellement testé dans le cadre d’une investigation clinique pour le traitement de cancers cutanés. L’action de ce dispositif consiste en l’émission de particules alpha provenant de sources de radium-224 qui sont implantées dans la tumeur à l’aide d’un applicateur et y restent de 15 à 20 jours. La curiethérapie à débit de dose pulsé (Pulsed Dose‑Rate – PDR) délivre des débits de dose compris entre 2 et 12 Gy/h et utilise des sources d’iridium-192 présentant une activité maximale de 18,5 gigabecquerels (GBq), qui sont mises en œuvre avec un projecteur de source spécifique. Elle repose sur l’utilisation d’une seule source radioactive se déplaçant pas à pas et s’arrêtant à des positions et pour des durées prédéterminées. Les doses sont délivrées par séquence de 5 à 20 minutes, voire 50 minutes, toutes les heures pendant la durée du traitement prévu, d’où la dénomination de curiethérapie pulsée. En radiothérapie, les inspections conduites par l’ASN dans 40 % des services de radiothérapie en 2023, mises en perspective avec celles réalisées sur la période 2019-2022, permettant de couvrir l’ensemble du parc, confirment que les fondamentaux de la sécurité sont en place : organisation de la physique médicale, contrôles des équipements, formation à la radioprotection des patients et déploiement des démarches d’assurance de la qualité. Par ailleurs, l’ASN souligne les avancées dans le domaine des audits cliniques avec la réalisation fin 2023 des premiers audits par les pairs en radiothérapie et encourage une extension rapide de ces audits à la radiochirurgie. Toutefois, l’analyse sur la période 2019-2023 confirme que l’évaluation de l’efficacité des actions correctives constitue toujours le point faible des démarches de REX et peine à se généraliser. En outre, les démarches de retour d’expérience s’essoufflent avec moins de réunions des CREX et des analyses d’ESR moins approfondies. Le nombre d’ESR déclarés à l’ASN a fortement diminué depuis 2015. Si cette baisse est pour partie attribuable à une meilleure sécurisation des traitements, le risque de routinisation et la nécessité de redonner du sens à ces démarches afin de maintenir l’intérêt des professionnels et de garder une dynamique collective ont été soulignés lors du séminaire national des acteurs de la radiothérapie organisé par l’ASN, le 15 mars 2023. Par ailleurs, les analyses de risque a priori demeurent insuffisamment actualisées en amont d’un changement organisationnel ou technique ou à l’issue du REX des événements. La survenue d’événements, tels que des erreurs de latéralité, de positionnement, de délinéation des organes à risque et/ou des organes cibles et des erreurs de calibration, révèle toujours des fragilités organisationnelles et la nécessité d’évaluer régulièrement les pratiques. L’évaluation des nouvelles techniques et pratiques constitue toujours un enjeu pour permettre, notamment, une évaluation des effets radio-induits à long terme (hypofractionnement, thérapie flash, etc.) et la démonstration de leur avantage en comparaison avec les techniques existantes. C’est dans ce contexte que l’ASN a lancé en 2023 une étude afin de définir et recueillir des données nécessaires à l’évaluation de la radiothérapie adaptative. Elle poursuivra en outre, en 2024, l’analyse des enjeux de radioprotection associés à la thérapie flash dans le cadre des travaux du Canpri. Enfin, dans un contexte de plus grande complexité, de moindres ressources, de fortes innovations et d’évolution des organisations, l’ASN définira en 2024 les orientations de son prochain programme quadriennal d’inspections en associant les parties prenantes et en tirant les enseignements des pratiques d’inspections de ses homologues, ainsi que d’autres autorités en charge du contrôle d’activités à risque. Dans ce contexte, l’ASN appelle à nouveau à la vigilance des décideurs, des RAN et des professionnels sur la nécessité d’évaluer l’impact des changements sur la sécurité des traitements. SYNTHÈSE 220 Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2023 • 07 • Les utilisations médicales des rayonnements ionisants

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