Rapport de l'ASN 2023

La récurrence des écarts observés depuis plusieurs années sur la mise en place et la signalisation de la zone d’opération a amené l’ASN à adresser, en 2021, un courrier circulaire à l’ensemble de la profession lui demandant notamment de renforcer sa vigilance sur ce point. L’ASN rappelle également que, dans le cas de la gammagraphie, l’approche du projecteur avec un appareil de mesure, afin de s’assurer que la source radioactive est bien en position de sécurité dans celui‑ci, est indispensable. Il est encore trop souvent constaté que ce contrôle n’est pas réalisé ou qu’il n’est pas fait jusqu’au nez du projecteur (raccord entre le projecteur et la gaine d’éjection), ce qui pourrait entraîner des expositions importantes des opérateurs en cas de défaillance matérielle. Par ailleurs, l’ASN constate que la qualité des dossiers techniques qu’elle est amenée à instruire, dans le cadre de la préparation ou des suites d’inspections et lors des demandes d’autorisation qui lui sont adressées, est hétérogène. Les entreprises doivent notamment être plus vigilantes sur les rapports établissant la conformité de leurs installations aux référentiels techniques appropriés. L’ASN relève encore trop souvent des erreurs, notamment lorsque la réalisation de ces rapports a été sous‑traitée, erreurs conduisant parfois à des non‑conformités. L’ASN juge les risques d’incidents et les doses reçues par les travailleurs globalement bien maîtrisés par les entreprises, lorsque cette activité est réalisée dans une installation conforme à la réglementation applicable. La France offre un bon maillage d’installations fixes de radiographie industrielle. En effet, il y a en 2023 : ∙ 95 installations de gammagraphie autorisées (35 installations de gammagraphie et 60 installations mixtes, c’est‑à‑dire pouvant accueillir soit des gammagraphes, soit des appareils électriques émettant des rayonnements X) ; ∙ 465 installations de radiographie par rayonnements X autorisées (398 installations mettant en œuvre des appareils électriques, 60 installations mixtes et 7 installations mettant en œuvre des accélérateurs). Ce maillage permet ainsi à 82 % des professionnels de proposer des prestations de radiographie industrielle en installation (55 % pour la gammagraphie). Malgré la disponibilité des installations, l’ASN constate encore trop souvent que des pièces radiographiées au cours de chantiers pourraient être aisément déplacées dans une installation. Outre l’optimisation des doses pour les travailleurs, le risque d’indisponibilité (qui se compte en jours) du lieu du chantier, du fait de la mise en place d’une zone d’exclusion, en cas d’incident empêchant le retour de la source radioactive d’un gammagraphe en position de sécurité, serait alors éliminé. L’ASN estime que les donneurs d’ordre ont un rôle primordial à jouer pour faire progresser la radioprotection dans le domaine de la radiographie industrielle, en privilégiant les prestations de radiographie industrielle dans une installation, voire en ayant recours à des technologies alternatives. En effet, pour l’application des principes de justification et d’optimisation, les réflexions engagées sur le long terme par les professionnels du contrôle non destructif ont abouti à l’élaboration de guides ayant pour but de promouvoir l’utilisation de méthodes de substitution à la radiographie industrielle. Les travaux se poursuivent au sein des instances professionnelles, en particulier par l’évolution des codes de construction et de maintenance des équipements industriels, afin de privilégier l’utilisation de méthodes de contrôle non ionisantes. La sensibilisation de l’ensemble des acteurs constitue donc une priorité d’action. Les démarches régionales visant à établir des chartes de bonnes pratiques en radiographie industrielle, mises en œuvre depuis plusieurs années sous l’impulsion de l’ASN et de l’inspection du travail, notamment dans les territoires correspondant aux (anciennes) régions Provence‑Alpes‑Côte d’Azur, Normandie, Auvergne‑Rhône‑Alpes, Nord‑Pas‑de‑Calais, Bretagne et Pays de la Loire, permettent des échanges réguliers entre les différents acteurs. Les divisions de l’ASN et les autres administrations régionales concernées organisent également régulièrement des colloques de sensibilisation et d’échanges au niveau régional, pour lesquels les acteurs de cette branche professionnelle manifestent un réel intérêt. Enfin, en 2023 comme ces dernières années, aucune surexposition d’un opérateur de radiographie industrielle n’a été déclarée à l’ASN, même si plusieurs événements significatifs liés à la perte de contrôle de la source (« blocage de source ») lors de l’utilisation d’un gammagraphe ont eu lieu. À la différence de ces trois dernières années, aucune action ou manipulation inappropriée ou interdite n’a été entreprise par les opérateurs, évitant ainsi d’engendrer une exposition inutile ou de compliquer les interventions ultérieures nécessaires pour un retour à une situation normale. L’ASN rappelle néanmoins l’obligation, pour tous les utilisateurs de gammagraphes, de respecter la conduite à tenir face à une situation de « blocage de source » hors du projecteur, laquelle consiste dans la phase d’urgence, à cesser immédiatement toute manipulation du projecteur ou de ses accessoires, à mettre en place rapidement un périmètre de sécurité pour éviter toute nouvelle exposition aux rayonnements ionisants et à prendre contact pour assistance avec le fournisseur de l’appareil. L’ASN reste particulièrement vigilante à la gestion de ces événements. La nécessité de prévoir une organisation d’urgence permettant de gérer le cas échéant un tel événement a d’ailleurs été rappelée dans le courrier circulaire envoyé aux professionnels par l’ASN en 2021. En cas de manquements graves, des sanctions pénales ont déjà été proposées et continueront de l’être. 3.2 LES IRRADIATEURS INDUSTRIELS 3.2.1 Les équipements utilisés L’irradiation industrielle est utilisée pour la stérilisation de dispositifs médicaux, de produits pharmaceutiques ou cosmétiques et la conservation de produits alimentaires. Elle est également utilisée afin de modifier volontairement les propriétés de matériaux pour le durcissement des polymères, par exemple. Ces techniques d’irradiation de produits de consommation peuvent être autorisées car, à l’issue de leur traitement, ces produits ne présentent aucune radioactivité artificielle résiduelle (les produits sont stérilisés en passant dans un rayonnement sans être eux‑mêmes « activés » à l’issue du traitement). Les irradiateurs industriels utilisent souvent des sources de cobalt-60 dont l’activité peut être très importante et dépasser 250 000 térabecquerels (TBq). Certaines de ces installations sont classées INB (voir chapitre 13). Dans de nombreux secteurs, l’utilisation de sources scellées de haute activité pour l’irradiation de produits est progressivement remplacée par l’utilisation d’appareils électriques émettant des rayons X (voir point 1.3.1). 3.2.2 L’évaluation de l’état de la radioprotection Hors INB, l’ASN a effectué, de 2019 à 2023, 18 inspections (dont deux en 2023) dans ce secteur, sur les 25 établissements actuellement autorisés. Il ressort de ces contrôles que l’organisation de la radioprotection (notamment la désignation d’un CRP), le zonage mis en place chez les exploitants inspectés, l’information des nouveaux arrivants et la réalisation des vérifications sont satisfaisants, aucun écart réglementaire significatif n’ayant été constaté. Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2023 263 • 08 • Les sources de rayonnements ionisants et les utilisations industrielles, vétérinaires et en recherche de ces sources 08 05 15 11 04 14 06 07 13 AN 03 10 02 09 12 01

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