Rapport de l'ASN 2023

La centrale nucléaire de Fessenheim a été arrêtée définitivement en 2020. Il s’agira des deux premiers réacteurs de 900 mégawatts électriques (MWe), représentatifs du parc actuel de réacteurs exploités par EDF, à être démantelés en France. Le démantèlement des réacteurs de Fessenheim constituera donc également un REX important pour les autres REP d’EDF (voir « Panorama régional » en introduction de ce rapport). 2.1.2 Les réacteurs électronucléaires autres que les réacteurs à eau sous pression Les réacteurs électronucléaires autres que les REP correspondent tous à des prototypes industriels. Ce sont les réacteurs de première génération de type uranium naturel‑graphite‑gaz (UNGG), ainsi que le réacteur à eau lourde EL4-D sur le site de Brennilis, et les réacteurs à neutrons rapides refroidis au sodium, Phénix et Superphénix. Le démantèlement de ces réacteurs est caractérisé par l’absence de REX en France et à l’international, et par le fait qu’au moment de leur conception la perspective de leur démantèlement futur n’était pas aussi structurante qu’elle a pu l’être pour les réacteurs de série plus récents. Compte tenu de leur caractère unique, il est donc nécessaire de concevoir et réaliser des opérations spécifiques et complexes pour les démanteler. En outre, certains de ces réacteurs sont arrêtés depuis plusieurs décennies, ce qui a conduit à une perte de connaissance de l’installation et de son exploitation, ainsi que des compétences associées. Comme pour les REP, le démantèlement commence par le retrait du combustible nucléaire, qui permet de retirer 99 % de la radioactivité présente dans l’installation. Les puissances thermiques de ces réacteurs étant assez élevées (toutes supérieures à 250 mégawatts thermiques – MWth), leur démantèlement nécessite la mise en œuvre de moyens téléopérés dans certaines zones restées fortement irradiantes, en particulier au voisinage du cœur du réacteur. Les réacteurs UNGG ont la particularité d’être des réacteurs de grandes dimensions et très massifs, nécessitant notamment des techniques de découpe et d’accès innovantes, dans des conditions d’irradiation élevées. Le démantèlement de ces réacteurs conduira EDF à gérer des volumes de déchets significatifs. L’exutoire final de certains de ces déchets est en cours de définition, comme les briques de graphite, représentant environ 15000 tonnes de déchets qui seront produits, pour lesquelles un stockage adapté aux déchets nucléaires de faible activité à vie longue (FA‑VL) est envisagé. Le démantèlement du réacteur prototype à eau lourde (EL4‑D), situé sur le site de Brennilis, a été ralenti, d’une part en raison de l’absence de REX concernant les techniques de démantèlement à mettre en œuvre ; d’autre part en raison de difficultés concernant l’installation de conditionnement et d’entreposage de déchets activés (Iceda – voir « Panorama régional » en introduction de ce rapport) qui doit prendre en charge certains des déchets de ce démantèlement. Iceda étant désormais en service et le scénario de démantèlement du bâtiment réacteur établi, le démantèlement de l’installation reprendra en 2024, pour réaliser un démantèlement complet de l’installation d’ici fin 2041, encadré par le décret n°2023-898 du 26 septembre 2023. Le démantèlement des réacteurs refroidis au sodium (Phénix et Superphénix) n’est confronté à aucun obstacle technologique majeur. Les enjeux spécifiques résident principalement dans la maîtrise du risque d’incendie lié à la présence de sodium et à la sûreté de ses procédés de traitement. 2. Triton fut l’un des premiers réacteurs de recherche très compacts et très souples, de type piscine, dénommés « MTR » (Material Test Reactor). Triton (6,5 MWth) fut implanté en 1959 à Fontenay‑aux‑Roses. 2.2 LES INSTALLATIONS DE RECHERCHE 2.2.1 Les laboratoires de recherche Quatre laboratoires de recherche sont en cours de démantèlement ou en préparation au démantèlement. Il s’agit du laboratoire de haute activité (LHA) de Saclay (INB 49), du laboratoire de purification chimique (LPC) de Cadarache (INB 54), de l’atelier des matériaux irradiés (AMI) de Chinon (INB 94) et du laboratoire dénommé « Procédé » de Fontenay‑aux‑Roses (INB 165). Ces laboratoires ont démarré leur activité dans les années 1960 ; ils étaient dédiés à la recherche réalisée en soutien au développement de la filière électronucléaire en France. Ces installations très anciennes sont toutes confrontées à la problématique de gestion des déchets dits « historiques », entreposés sur place à une époque où les filières de gestion n’avaient pas été mises en place : déchets nucléaires de moyenne activité à vie longue (MA‑VL), déchets sans filière de gestion (par exemple, des huiles et liquides organiques non incinérables, ou des déchets contenant des composés du mercure potentiellement hydrosolubles). Par ailleurs, des incidents ont eu lieu lors de leur exploitation, contribuant à l’émission de substances radioactives à l’intérieur et à l’extérieur des enceintes de confinement et à des pollutions plus ou moins importantes des structures et des sols, ce qui rend les démantèlements et assainissements nécessaires plus complexes et plus longs. Une des étapes les plus importantes – et parfois difficile du fait d’archives incomplètes – du démantèlement de ce type d’installation consiste donc à établir le plus précisément possible l’inventaire des déchets et l’état radiologique de l’installation, pour pouvoir définir les étapes du démantèlement et les filières de gestion des déchets. 2.2.2 Les réacteurs de recherche À la fin de l’année 2023, huit réacteurs expérimentaux sont définitivement arrêtés : Rapsodie (réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium), Masurca, Éole et Minerve (maquettes critiques), Phébus (réacteur d’essai), Osiris et Orphée (réacteurs de type « piscine ») et Isis (réacteur d’enseignement). Le réacteur d’enseignement Ulysse a quant à lui été déclassé en 2022. Ces réacteurs sont caractérisés par une puissance plus faible (de 100 watts thermiques à 70 MWth) que les réacteurs électronucléaires. Leur démantèlement n’avait pas été anticipé au moment de leur conception, dans les années 1960 à 1980. Lors du démantèlement, ces installations présentent généralement un faible terme source radiologique, puisque l’une des premières opérations après l’arrêt définitif consiste à évacuer le combustible usé. L’un des principaux enjeux réside dans la production de volumes importants de déchets TFA et dans leur gestion, afin d’assurer leur entreposage puis leur élimination par une filière appropriée. Les réacteurs de recherche bénéficient d’un REX significatif, lié au démantèlement de nombreuses installations similaires en France (Siloé, Siloette, Mélusine, Harmonie, Triton(2), le réacteur universitaire de Strasbourg – RUS, Ulysse) et à l’international. Leur démantèlement se fait habituellement sur des durées de l’ordre de la dizaine d’années, mais la multiplicité d’installations à démanteler simultanément peut conduire à envisager des durées de démantèlement significativement plus longues pour certains réacteurs du CEA. Après l’assainissement des zones activées ou contaminées, conduisant à l’évacuation de l’ensemble des déchets radioactifs vers des filières adaptées, la majorité de ces réacteurs ont été démolis avec envoi des déchets en filière conventionnelle. Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2023 355 • 14 • Le démantèlement des installations nucléaires de base 05 15 08 11 04 06 07 13 AN 03 10 02 09 12 14 01

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