Rapport de l'ASN 2022

3.3 Le financement du démantèlement : avis de l’ASN sur les rapports triennaux Le cadre réglementaire de la sécurisation des fonds nécessaires à la gestion des charges de long terme pour le démantèlement et la gestion des déchets est présenté au point 1.4. L’ASN a instruit en 2022 les rapports triennaux remis par les exploitants, portant sur les comptes clôturés fin 2021. Elle a publié l’avis n° CODEP‑CLG-2022‑061286 du 14 décembre 2022 et transmis ses observations au ministère chargé de l’énergie. Les prochains rapports triennaux seront remis en 2025. De manière générale, l’ASN relève que le périmètre d’évaluation des charges pris en compte dans la majorité de ces rapports doit être complété car il ne prend pas en compte certaines opérations susceptibles de présenter de forts enjeux financiers, notamment les opérations préparatoires au démantèlement. De plus, l’ASN estime que les états initiaux des sites au début de leur démantèlement doivent être décrits plus précisément, en tenant compte des éventuelles pollutions présentes dans les sols et dans les structures, et en évaluant les coûts d’assainissement associés. En effet, les hypothèses relatives à l’état initial des sites ne sont globalement pas assez robustes, alors qu’il est fondamental d’avoir une bonne connaissance de l’état des sites afin de pouvoir évaluer, de manière prudente, les charges de démantèlement. Enfin, L’ASN souligne que les hypothèses retenues pour l’évaluation des coûts complets doivent être réévaluées, afin d’être raisonnablement prudentes pour ce qui concerne la planification des projets et des programmes de démantèlement, en tenant compte des risques liés à l’indisponibilité des installations d’entreposage, de traitement et de stockage. 4. L’évaluation des stratégies de démantèlement des exploitants Dans un contexte où de nombreuses installations sont arrêtées depuis plusieurs décennies, avec une perte de la connaissance des installations, des structures vieillissantes et parfois une quantité importante de déchets encore présente, le bon avancement des opérations de démantèlement est un enjeu majeur pour la sûreté de ces installations. Or, l’ASN a constaté que la plupart de ces opérations prenaient des retards importants. L’ASN demande donc régulièrement au CEA, à EDF et à Orano de présenter leur stratégie de démantèlement et de gestion des déchets radioactifs, ce qui permet de disposer d’une vision globale des projets de démantèlement et des filières de gestion nécessaires à l’évacuation des déchets radioactifs produits pendant les opérations de démantèlement. En ce qui concerne le démantèlement, les exploitants doivent justifier, principalement par des analyses de sûreté, les opérations prioritaires. Cette hiérarchisation permet de contrôler que les moyens les plus importants seront consacrés aux opérations à plus fort enjeu, même si certains projets connaissent des retards significatifs. En ce qui concerne la gestion des déchets radioactifs, l’ASN vérifie la cohérence des actions envisagées avec le cadre réglementaire et les orientations du PNGMDR. L’évaluation des stratégies de gestion des déchets radioactifs est présentée au chapitre 14. 4.1 L’évaluation de la stratégie d’EDF Le premier dossier relatif à la stratégie de démantèlement des réacteurs définitivement à l’arrêt d’EDF (Chinon A1, A2, A3, Saint‑Laurent A1 et A2, Bugey 1, EL4-D, Chooz A et Superphénix) a été transmis en 2001 à la demande de l’ASN. Le démantèlement immédiat avait été retenu comme stratégie de référence. Cette stratégie a été régulièrement mise à jour, afin d’ajuster le calendrier de démantèlement ou encore d’y intégrer les études complémentaires demandées par l’ASN et des éléments relatifs au démantèlement futur du parc de réacteurs en fonctionnement. Pour les six réacteurs de première génération de type UNGG (Chinon A1, A2 et A3, Saint‑Laurent A1 et A2, et Bugey 1), EDF a annoncé à l’ASN, en mars 2016, un changement complet de stratégie remettant en cause la principale technique retenue (démantèlement « sous eau ») pour réaliser le démantèlement de ces réacteurs et le cadencement des démantèlements, conduisant ainsi à retarder le démantèlement de l’ensemble des réacteurs UNGG de plusieurs décennies. L’ASN se prononcera sur les délais de démantèlement présentés par EDF dans les dossiers de démantèlement qui ont été remis fin 2022, qui pourront également être revus s’il apparaît dans les décennies à venir que des optimisations de ce scénario sont possibles compte tenu du REX acquis. Cette stratégie de démantèlement des réacteurs UNGG est encadrée par deux décisions n° 2020-DC-0686 et n° CODEP‑CLG-2020‑021253 du 3 mars 2020 de l'ASN. Ces décisions fixent les prochaines étapes nécessaires au changement de stratégie de démantèlement, notamment la définition d’une stratégie robuste de gestion des déchets de graphite, les opérations de démantèlement à poursuivre au cours des prochaines années et les informations à transmettre à l’ASN pour contrôler la mise en œuvre effective de la stratégie. En 2022, EDF a également mis en service son démonstrateur industriel graphite, situé à Chinon. L’ASN considère qu’il est pertinent qu’EDF développe un démonstrateur industriel avant le démantèlement des caissons des réacteurs, mais qu’il convient néanmoins que le démantèlement des différents réacteurs soit engagé dans des délais raisonnables au regard de l’obligation de démantèlement dans des délais aussi courts que possible. Concernant les autres installations d’EDF arrêtées (notamment Chooz A, l’AMI Chinon, EL4-D, Superphénix), leurs démantèlements sont en cours et se déroulent globalement conformément à l’objectif d’un délai aussi court que possible. 4.2 L’évaluation de la stratégie d’Orano Le démantèlement d’installations anciennes constitue un enjeu majeur pour Orano, qui doit mener plusieurs projets de démantèlement de grande envergure sur des échelles de temps variables (usine UP2‑400 de La Hague, usine Eurodif Production, installations individuelles de l’INBS de Pierrelatte, etc.). La mise en œuvre du démantèlement est étroitement liée à la stratégie de gestion des déchets radioactifs, compte tenu de la quantité et du caractère non standard et difficilement caractérisable des déchets produits lors des opérations antérieures d’exploitation ainsi que les opérations actuelles de démantèlement. Par ailleurs, Orano doit réaliser, dans des installations anciennes d’entreposage, des opérations particulières de RCD. Des échéances de réalisation ont été prescrites par l’ASN, en particulier pour le site de La Hague. La réalisation de ces opérations de RCD conditionne la progression du démantèlement de l’usine UP2‑400, la RCD figurant parmi les premières étapes du démantèlement de l’usine. Les chantiers de RCD revêtent une importance particulière, compte tenu de l’inventaire de substances radioactives présentes et du caractère ancien des installations les entreposant, qui ne répondent plus aux normes de sûreté actuelles. Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2022 357 • 13 • Le démantèlement des installations nucléaires de base 13 05 01 07 08 AN 04 10 06 12 14 03 09 11 02

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